Prof. Dr. PETITPIERRE Geneviève Département de Pédagogie Spécialisée Université de Fribourg
Prof. Dr. GREMAUD Germaine Filière travail social HETS&Sa – EESP, Lausanne
TESSARI VEYRE Aline Département de Pédagogie Spécialisée Université de Fribourg HETS&Sa – EESP, Lausanne
BRUNI Ivo Département de Pédagogie Spécialisée Université de Fribourg
Les apprentissages à l'âge adulte, ce qu'en disent les personnes avec une déficience intellectuelle.
Les adultes avec une déficience intellectuelle (DI) manifestent, quand on les questionne, une grande envie d’acquérir de nouvelles connaissances. C’est ce que constatent des chercheurs de l’Université de Fribourg et de la Haute école de travail social et de la santé-EESP de Lausanne. Selon leur étude menée sur trois ans auprès de soixante participants, 88% des personnes interrogées estiment qu’elles peuvent encore apprendre à l’âge adulte. Elles ne sont que 3% à exprimer un avis clairement négatif et 9% un avis fluctuant. Brochure complète PDF Résultats faciles à comprendre | Findings presentation
Université de Fribourg
Haute Ecole Spécialisée de Suisse occidentale
Fonds national suisse de la recherche scientifique
Département de pédagogie spécialisée
Haute école de travail social et de la santé | EESP | Lausanne
01 Le sentiment d’être un apprenant.
La grande majorité des personnes interviewées se considèrent encore comme étant en mesure d’apprendre. L’âge, de même que l’étiologie, semblent n’avoir aucune influence sur les opinions exprimées.
Certains considèrent toutefois que l’apprentissage est tributaire de conditions particulières et ils nuancent leur prise de position.
L’envie d’apprendre une nouvelle activité sportive vient en tête, suivie par les activités artistiques et de loisirs. Concernant les activités pratiques du quotidien, apprendre à tenir un ménage est souvent mentionné dans la perspective de gagner en indépendance et de quitter le milieu institutionnel.
Les tâches conceptuelles visant à perfectionner la lecture ou le calcul, ou à développer de nouvelles habiletés, comme les langues étrangères ou la maîtrise des nouvelles technologies sont des projets fréquemment évoqués. Ces résultats témoignent du fait que les personnes avec une déficience intellectuelle sont conscientes de leurs lacunes dans ces domaines et plusieurs souhaitent parfaire leurs connaissances.
03 Les facteurs influençant les projets d’apprentissage.
Les facteurs personnels comme la motivation, l’envie et le désir sont déterminants pour la mise en œuvre des projets d’apprentissage. Le bon fonctionnement des processus cognitifs comme par exemple, la mémoire, est également reconnu par les participants comme des facteurs facilitant les apprentissages. De même, pouvoir s’appuyer sur un certain nombre de connaissances scolaires préalables constitue un réel atout.
Certains facteurs environnementaux, par exemple l’aide de l’équipe éducative ou de la famille, sont également considérés comme des facilitateurs. Avoir accès à du matériel adapté comme un ordinateur, des livres ou encore une machine à calculer est perçu comme pouvant faciliter la mise en œuvre du projet d’apprentissage.
04 Les compétences mobilisées grâce à la scolarité
Y a-t-il un lien entre le plaisir pris à apprendre à lire, écrire ou calculer durant la scolarité et l’envie d’apprendre à l’âge adulte ? Les chercheurs ont d’abord demandé aux participants de qualifier le plaisir éprouvé dans ces tâches, puis dans les entretiens, ils leur ont demandé quelles compétences ils pensaient le plus utiliser. Pour évaluer ce plaisir, l’interviewé était invité à déplacer un curseur allant d’un smiley exprimant « beaucoup aimé » à un autre exprimant « pas du tout aimé » pour chacune des matières.
Plus de 64% des personnes questionnées ont beaucoup aimé apprendre à lire et à écrire, alors que pour les mathématiques le pourcentage n’atteint que 41%. D’ailleurs une personne sur cinq (21%) dit ne pas aimer du tout cette matière, contre 2% pour la lecture et que tous sans exception disent aimer l’écriture. Ni l’âge, ni le genre, ni l’étiologie des participants n’influencent les appréciations exprimées à l’égard des apprentissages réalisés durant la scolarité.
L’équipe de chercheurs a demandé aux participants d’expliciter le contenu des apprentissages qu’ils estiment avoir réalisés à l’âge adulte. Tous les répondants (n personnes = 60) expriment le sentiment d’avoir réalisé un ou plusieurs apprentissages depuis qu’ils sont adultes. Une moyenne de 12,7 apprentissages par personne est relevée. De manière générale, les apprentissages liés au travail, à la vie quotidienne et aux activités de loisirs sont majoritairement cités. Les autres contextes sont mentionnés, mais ils jouent un rôle plus marginal.
De manière générale, les apprentissages liés au travail, à la vie quotidienne et aux activités de loisirs sont majoritairement cités. Les autres contextes sont mentionnés, mais ils jouent un rôle plus marginal.
06 Les facteurs influençant les apprentissages réalisés à l'âge adulte
L’équipe de chercheurs a demandé aux participants quels facteurs ont influencé les apprentissages qu’ils ont réalisés à l’âge adulte.
Les facilitateurs, qu’ils soient personnels ou environnementaux, représentent plus des trois quarts des variables d’influence rapportées par les répondants (n occurrences = 611). Les facteurs environnementaux (n occurrences = 442) sont plus fréquemment mentionnés que les facteurs personnels (n occurrences = 326).
Le nombre, ainsi que le type de facteurs mentionnés comme ayant influencé les projets d’apprentissage, ne varient pas en fonction du genre et de l’étiologie des participants. En ce qui concerne l’influence de l’âge, les personnes plus jeunes disent avoir rencontré moins d’obstacles environnementaux en comparaison du groupe plus âgé et du groupe d’âge intermédiaire. Il n’y a par contre pas de différence en ce qui concerne les obstacles personnels rencontrés, ni les facilitateurs qu’ils soient personnels ou environnementaux.
Les chercheurs ont demandé aux participants s’ils avaient suivi des cours ou des formations spécifiques après ceux dispensés à l’école obligatoire. Parmi les soixante participants interviewés, quarante-neuf (81,7%) disent avoir suivi des formations à l’âge adulte. Onze personnes (18,3%) n’ont suivi aucun cours une fois leur scolarité achevée. Deux personnes expliquent qu’ils ou elles travaillaient, une autre explique ne pas avoir pu faire de cours et avoir dû apprendre à « travailler sur le tas », deux autres expriment ne pas avoir eu envie d’apprendre, une dernière évoque l’absence d’offres de formation. Enfin les cinq personnes restantes disent ne pas se souvenir ou ne donnent pas d’explications.
A toutes les personnes qui ont accepté de prendre part aux interviews,
ont donné de leur temps et ont partagé leurs expériences en lien avec
la question des apprentissages à l’âge adulte ;
A leurs parents et tuteurs qui ont accueilli favorablement l’idée de cette recherche ;
Aux établissements socio-éducatifs qui ont accepté d’organiser les nombreux
entretiens et de jongler avec les disponibilités des uns et des autres.
Les établissements concernés sont :
les Ateliers de la Glâne,
la Cité du Genévrier,
Eben-Hézer Lausanne,
les Etablissements Publics pour l’Intégration,
l’Espérance,
la Fondation Les Perce-Neige,
la Fondation Renée Delafontaine,
la Fondation valaisanne en faveur des personnes handicapées mentales ;
A Mesdames Cindy Diacquenod et Natacha Beaufort pour leur aide lors de certaines
étapes de la procédure d’évaluation ;
A Madame Lydie Diacquenod pour le graphisme de la brochure ;
A Monsieur Christophe Hans pour ses conseils pour la rédaction de ce texte ;
Enfin aux organismes qui ont soutenu financièrement cette recherche,
à savoir le Fonds National suisse de la Recherche Scientifique (100013_135070/1), la HES-SO,
la Haute école de travail social et de la santé | EESP | Lausanne et l’Institut de pédagogie
curative de l’Université de Fribourg.